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La sentenza della Cour de cassation francese n. 851/2016 del 6/7/2016 interviene (dopo il Conseil constitutionnel) in materia di indennità risarcitoria per la privazione della qualità di avvocato. Richiama, al riguardo, l'art. 1 del Protocollo n. 1 alla CEDU e la giurisprudenza della Corte di Strasburgo (in particolare la sentenza Scordino c. Italia).

LEGGI DI SEGUITO LA SENTENZA 851/2016 DELLA COUR DE CASSATION FRANCESE N. 851/2016 ...


 

Arrêt n° 851 du 6 juillet 2016 (15-17.346 ; 15-19.341) - Cour de cassation - Première chambre civile - ECLI:FR:CCASS:2016:C100851

 

OFFICIERS PUBLICS OU MINISTÉRIELS ; AVOUÉ

Rejet et Cassation partielle

 

Officiers publics ou ministériels ; Avoué

 

Pourvoi 15-17.346

 

Demandeur(s) : M. X... ; et autre

 

Défendeur(s) : Le Fonds d’indemnisation de la profession d’avoué ; et autres

 

Pourvoi 15-19.341

 

Demandeur(s) : Le Fonds d’indemnisation de la profession d’avoué

 

Défendeur(s) : La Direction régionale des finances publiques d’Ile-de-France et du département de Paris ; et autres

 

Joint les pourvois n° Q 15-17.346 et G 15-19.341, qui sont formés contre le même arrêt ;

 

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que la loi n° 2011-94 du 25 janvier 2011 portant réforme de la représentation devant les cours d’appel a supprimé le monopole des avoués, procédé notamment à leur intégration dans la profession d’avocat et fixé les règles et la procédure d’indemnisation applicables ; qu’ayant refusé l’offre d’indemnisation qui leur avait été notifiée par la commission prévue à l’article 16 de la loi, la société civile professionnelle Z..., X...et Y..., précédemment titulaire d’un office d’avoué près la cour d’appel de Caen, en liquidation amiable (la SCP), Mme Y... et M. X..., anciens avoués associés de la SCP, ont saisi le juge de l’expropriation en paiement de diverses indemnités ;

 

Sur le moyen unique du pourvoi n° Q 15-17.346 :

 

Attendu que Mme Y... et M. X... font grief à l’arrêt de rejeter leurs demandes, alors, selon le moyen :

 

1°/ que l’article 13 de la loi du 25 janvier 2011 « portant réforme de la représentation devant les cours d’appel » prévoit que « les avoués près les cours d’appel en exercice à la date de la publication de la présente loi ont droit à une indemnité au titre du préjudice correspondant à la perte du droit de présentation, fixée par le juge de l’expropriation dans les conditions définies par les articles L. 13-1 à L. 13-25 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique » ; qu’aux termes de l’article L. 13-13 du code de l’expropriation auquel il est expressément renvoyé, les « indemnités allouées doivent couvrir l’intégralité du préjudice direct, matériel et certain, causé par l’expropriation » en sorte que la loi du 25 janvier 2011, dans sa rédaction issue de la censure opérée par le Conseil constitutionnel le 20 janvier 2011, a réservé la possibilité, pour les avoués, d’obtenir l’indemnisation intégrale des préjudices directs, matériels et certains causés par l’expropriation de fait résultant de la suppression de leur profession ; qu’en l’espèce, M. X... et Mme Y... sollicitaient l’indemnisation de leurs préjudices de perte de revenus, de trouble dans les conditions d’existence, de trouble professionnel et de perte de droits à la retraite, préjudices dont ils démontraient que la matérialité était incontestable ; qu’en refusant d’indemniser intégralement ces préjudices, la cour d’appel a violé l’article 13 de la loi du 25 janvier 2011 « portant réforme de la représentation devant les cours d’appel », ensemble l’article L. 13-13 du code de l’expropriation dans sa version applicable au cas d’espèce ;

 

2°/ que, dans sa décision n° 2010-624 DC du 20 janvier 2011, le Conseil constitutionnel a partiellement censuré, comme étant contraire au principe d’égalité des citoyens devant les charges publiques, l’article 13 de la loi portant réforme de la représentation devant les cours d’appel au motif que celui-ci, tout en fixant au 31 mars 2012 la date à laquelle l’indemnité allouée aux avoués devait être arrêtée, accordait aux avoués, sans considération de la situation propre de chacun d’eux, un droit à obtenir l’indemnisation de « préjudices économiques et [d’]autres préjudices accessoires toutes causes confondues », lesquels préjudices, à ses yeux, présentaient, à cette date, un caractère « éventuel » ; qu’en déboutant Mme Y... et M. X... de leurs demandes tendant notamment à l’indemnisation de leurs pertes de revenus, de leur perte de droit à la retraite ainsi que des troubles qu’ils avaient subis dans leurs conditions d’exercice et dans l’exercice de leur activité professionnelle, au prétexte qu’elle était placée dans l’impossibilité de « faire application d’une disposition déclarée inconstitutionnelle » par le Conseil constitutionnel cependant que Mme Y... et M. X... ne sollicitaient pas la réintégration, dans l’ordonnancement juridique, de la norme que le Conseil constitutionnel avait, dans sa décision n° 2010-624 DC du 20 janvier 2011, jugée contraire au principe d’égalité des citoyens devant les charges publiques en sollicitant l’indemnisation de préjudices éventuels mais, ayant subi en fait des préjudices certains et quantifiables, en demandaient la réparation, conformément aux dispositions de l’article 13 de la loi du 25 janvier 2011 et au principe de réparation intégrale posé par l’article L. 13-13 du code de l’expropriation – principe dont le Conseil constitutionnel n’a, à aucun moment, constaté le caractère inconstitutionnel, la cour d’appel a méconnu les termes du litige et violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

 

3°/ qu’en estimant qu’il résultait de la décision n° 2010-624 DC du 20 janvier 2011 que serait contraire au principe constitutionnel d’égalité des citoyens devant les charges publiques l’indemnisation intégrale, sur le fondement de l’article L. 13-13 du code de l’expropriation, des préjudices financiers subis par les avoués dont le caractère certain serait, comme en l’espèce, incontestablement établi au jour où le juge de l’expropriation serait amené à statuer, la cour d’appel l’a dénaturée et méconnu l’article 62 de la Constitution du 4 octobre 1958 ;

 

4°/ qu’à supposer même qu’il puisse être retenu contre la lettre et l’esprit de la loi du 25 janvier 2011 que cette loi n’autoriserait pas l’indemnisation des préjudices de perte de revenus, de trouble dans les conditions d’existence, de trouble professionnel et de perte de droits à la retraite revendiqués par Mme Y... et M. X..., et dont la matérialité était incontestablement établie, son application devrait alors être écartée comme contraire aux articles 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; que les décisions du Conseil constitutionnel n’ont d’autorité qu’en ce qui concerne la constitutionnalité des lois ; que l’autorité attachée aux décisions du Conseil constitutionnel ne limite pas la compétence du juge ordinaire pour exercer son contrôle de conventionnalité (CC Déc. n° 2010 – 605 DC) ; que sauf à procéder à un contrôle indirect de constitutionnalité des traités, le juge ordinaire ne peut se prévaloir de l’autorité attachée à une décision de non-conformité d’une loi rendue par le Conseil constitutionnel pour refuser d’apprécier la compatibilité d’une disposition législative avec les dispositions spécifiques d’une Convention internationale ; qu’en estimant que l’autorité de la chose décidée par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2010-624 DC du 20 janvier 2011 lui interdisait de vérifier la conformité de la loi, telle qu’elle résultait de la censure du Conseil constitutionnel, au regard des exigences spécifiques de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, la cour d’appel a violé les articles 55 et 62 de la Constitution du 4 octobre 1958 ;

 

5°/ que dans sa décision n° 2010-624 DC du 20 janvier 2011, le Conseil constitutionnel a censuré, comme étant contraire au principe d’égalité des citoyens devant les charges publiques, l’article 13 de la loi portant réforme de la représentation devant les cours d’appel au motif que celui-ci, tout en fixant au 31 mars 2012 la date à laquelle l’indemnité allouée aux avoués devait être arrêtée, accordait aux avoués un droit à obtenir l’indemnisation de « préjudices économiques et [d’]autres préjudices accessoires toutes causes confondues » qui, à ses yeux, présentaient, à cette date, un caractère « éventuel » ; qu’en déboutant Mme Y... et M. X... de leurs demandes tendant notamment à l’indemnisation de leurs pertes de revenus et de leurs pertes de droits à la retraite au prétexte qu’elle était placée dans l’impossibilité de « faire application d’une disposition déclarée inconstitutionnelle » par le Conseil constitutionnel en raison de l’autorité conférée à cette décision par l’article 62 de la Constitution, cependant que Mme Y... et M. X... ne sollicitaient pas la réintégration, dans l’ordonnancement juridique, de la norme que le Conseil constitutionnel avait, dans sa décision n° 2010-624 DC du 20 janvier 2011, jugée contraire au principe d’égalité des citoyens devant les charges publiques en sollicitant l’indemnisation de préjudices éventuels mais, ayant subi en fait des préjudices certains et quantifiables dont la loi n’assurerait pas la réparation, reprochaient à celle-ci de ne pas assurer un juste équilibre entre la privation de propriété qu’ils subissaient et les considérations d’intérêt général qui l’animaient puis demandaient l’application du principe de réparation intégrale tel que consacré par la Cour européenne des droits de l’homme, sur le fondement de l’article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention éponyme, principe dont le Conseil constitutionnel n’a, à aucun moment, constaté le caractère inconstitutionnel, la cour d’appel a méconnu les termes du litige et violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

 

6°/ qu’en estimant qu’il résultait de la décision n° 2010-624 DC du 20 janvier 2011 que serait contraire au principe constitutionnel d’égalité des citoyens devant les charges publiques l’indemnisation intégrale, par le juge de l’expropriation, des préjudices financiers subis par les avoués dont le caractère certain serait, comme en l’espèce, incontestablement établi au jour où celui-ci serait amené à statuer, la cour d’appel l’a dénaturée et méconnu l’article 62 de la Constitution du 4 octobre 1958 ;

 

7°/ que le juge ordinaire doit s’efforcer d’interpréter les décisions du Conseil constitutionnel, comme toute norme, en conformité avec les stipulations de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; qu’en refusant de rechercher si, interprétée à la lumière des stipulations de la Convention européenne, la décision rendue par le Conseil constitutionnel n’avait pas pu en réserver l’application et ne permettait pas, en particulier, aux avoués d’invoquer le principe de réparation intégrale tel que consacré par l’article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, s’ils justifiaient, devant le juge de l’expropriation, d’un préjudice certain et incontestable, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision au regard de l’article 62 de la Constitution du 4 octobre 1958 ;

 

8°/ que, saisie d’une exception d’inconventionnalité tendant à contester la conformité d’une loi emportant privation de propriété sur le fondement de l’article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, le juge est tenu de vérifier, au regard de la situation concrète dans laquelle le demandeur se trouve placé, si l’indemnité à laquelle il peut prétendre en application de la loi est proportionnée à l’atteinte qu’il subit et aux considérations d’intérêt général qui animent le législateur interne ; que pour refuser d’écarter les dispositions contestées de la loi du 25 janvier 2011, dont l’effet serait de limiter l’indemnisation de Mme Y... et M. X... à la seule perte du droit de présentation, la cour d’appel a relevé en substance qu’« au jour de l’entrée en vigueur de la loi », l’avoué perdait certes le bénéfice de son monopole mais que « de nombreuses parties continuent, eu égard à la spécificité et à la complexité de la procédure devant la cour d’appel, de recourir à un ancien avoué », que « des anciens partenariats entre avocats et anciens avoués peuvent être mis en place » et que l’« évolution des revenus des avoués dépend pour une grande part de choix professionnels faits postérieurement à la date de référence et de leurs aptitudes professionnels à s’adapter à la nouvelle situation concurrentielle résultant d’une loi s’inscrivant dans une évolution historique » ; qu’après avoir relevé les considérations d’intérêt général ayant motivé la suppression de la profession d’avoué et la limitation de leur indemnisation, la cour d’appel a encore relevé que la loi du 25 janvier 2011 procédait d’une « immixtion justifiée, voire obligatoire, des pouvoirs publics, proportionnée eu égard à l’intervention prévue du juge de l’expropriation susceptible d’indemniser raisonnablement les préjudices directement liés à la perte du droit de présentation, dans un contexte de forte contraintes budgétaires » et jugé que Mme Y... et M. X... devaient être « déboutés de leur demande d’indemnisation du préjudice économique allégué tenant au déséquilibre d’exploitation allégué, à leur perte de revenus et de droits à la retraite » ; qu’en procédant ainsi, par une analyse abstraite de la situation des avoués, alors qu’il lui appartenait de vérifier, au regard de la situation concrète de Mme Y... et M. X..., si la loi contestée leur assurait une juste et équitable réparation, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision au regard de l’article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention ;

 

9°/ qu’en se situant au jour de l’entrée en vigueur de la loi pour vérifier si celle-ci assurait un juste équilibre entre la nécessaire protection du droit de propriété et les considérations d’intérêt général qu’elle poursuivait cependant qu’il lui appartenait, afin d’apprécier in concreto la conventionnalité de la loi déférée, de se placer au jour où elle statuait afin de vérifier si, à cette date, Mme Y... et M. X... ne justifiaient pas avoir subi des préjudices incontestables dont la loi, telle qu’interprétée par le Fonds d’indemnisation, ne permettait pas une juste réparation et si au regard de leur situation concrète à cette date, la loi ne les privait pas d’une juste réparation des préjudices qu’ils devaient subir, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision au regard de l’article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention ;

 

10°/ qu’en statuant ainsi alors qu’il lui appartenait également de se situer au jour où elle statuait pour vérifier, au cas concret, si Mme Y... et M. X... n’avaient pas, en l’état des dispositions de la loi du 25 janvier 2011 telles qu’interprétées par le Fonds d’indemnisation, été indûment privés de leur droit d’accès au juge en se trouvant placés dans l’impossibilité de demander en justice l’indemnisation des préjudices qu’ils avaient personnellement subis du fait de la suppression de leur profession, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision au regard de l’article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

 

11°/ que les Etats membres à la Convention européenne des droits de l’homme sont tenus d’assurer un juste équilibre entre la nécessaire protection du droit de propriété et toute considération d’intérêt général dont ils poursuivent la réalisation ; qu’en l’espèce, Mme Y... et M. X... faisaient valoir qu’à supposer que la loi du 25 janvier 2011 ne leur ouvrît que la réparation de la perte de leur droit de présentation et leur refusât, notamment, l’indemnisation de leur perte de revenus et de leur perte de droits à retraite, qui, en l’état de leur situation particulière, étaient substantielles, il convenait d’en apprécier la conventionnalité au regard des articles 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; qu’ils démontraient avoir subi en fait une perte de revenus importante, le résultat net dégagé par l’activité de Mme Y... sur l’année 2012 s’étant même révélé négatif ; qu’ils ajoutaient qu’au regard de leur situation concrète, ils n’étaient manifestement pas en mesure de recouvrer des revenus identiques à ceux que leur assurait leur profession d’avoués en l’état des revenus importants que générait cette activité monopolistique et tarifée, de la surpopulation manifeste du barreau caennais au sein duquel ils exerçaient, du revenu moyen de l’avocat bas normand qui était bien moindre que celui qu’il percevait en leur qualité d’avoués ; qu’ils ajoutaient que, selon les statistiques dont le contenu n’était pas contesté, ils ne pourraient atteindre ces revenus moyens que dans une dizaine d’année et qu’à cet égard également, leur perte de revenus à terme était certaine ; qu’ils ajoutaient que la baisse de revenus actuelle qu’ils avaient subie et la baisse certaine qu’ils accuseraient à terme leur était d’autant plus dommageable qu’ils devaient supporter, en pure perte, la charge du remboursement des emprunts qu’ils avaient contractés pour faire l’acquisition de leur droit de présentation, charge qui s’élevait au 1er janvier 2012 aux sommes de 131 495,38 euros et 145 597,38 euros ; que la perte de revenus de M. X... était estimée à la somme de 2 381 513 euros et celle de Mme Y... à celle de 1 609 060 euros ; que le préjudice qu’ils subissaient au titre de leur perte de droit à la retraite était évalué aux sommes respectives de 149 840 euros et 117 272 euros ; qu’en déboutant cependant M. X... et Mme Y... de leurs demandes tendant à ce qu’il soit fait exception à l’application de la loi du 25 janvier 2011, ainsi interprétée, comme ne respectant pas le juste équilibre imposé par les stipulations de la Convention européenne des droits de l’homme, et en leur refusant, à la faveur de l’application de cette loi, l’indemnisation de tout préjudice, réserve faite de la seule perte de leur droit de présentation, la cour d’appel a violé les articles 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et 6, § 1, de cette Convention ;

 

12°/ qu’à admettre, à la faveur d’une dénaturation de l’arrêt attaqué, qu’en relevant que « Considérant sur l’indemnisation prévue par la loi des parts en industrie, qu’un même bénéfice ne pouvant être réparti deux fois, il convient de ne retenir que les situations où l’avoué bénéficiait de parts en industrie lui permettant de percevoir une part des bénéfices supérieure à celle à laquelle lui donnait droit sa participation dans le capital social ; que dans le cas contraire, il ne résulte pour lui aucun préjudice supplémentaire de la disparition de ces parts » et que « les avoués requérants ne se trouvant pas dans cette situation, ne justifient d’aucun préjudice à ce titre et doivent être déboutés de ce chef de demande, sans qu’il y ait lieu d’ordonner la communication requise des offres d’indemnisation faites par la commission, qui est inutile », la cour d’appel ait estimé que Mme Y... et M. X... ne justifiaient pas avoir accusé une perte de revenus qui viendrait s’ajouter à la perte de leur droit de présentation, la cour d’appel aurait violé l’article 455 du code de procédure civile en ne s’expliquant pas sur le bilan de la SCP pour l’exercice 2011, les déclarations 2035 des années 2005 à 2010 de Mme Y... et M. X..., sur les comptes de résultat provisoires de Mme Y... et M. X... produits aux débats ainsi que les comptes de résultats de M. X... au 31 août 2014 et de Mme Y... au 31 août 2014, qui démontraient que depuis l’entrée en vigueur de la loi, ceux-ci avaient incontestablement accusé une perte significative de revenus ;

 

Mais attendu, d’une part, qu’aux termes de l’article 13, alinéa 1er, de la loi du 25 janvier 2011, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2014-1345 du 6 novembre 2014, les avoués près les cours d’appel en exercice à la date de la publication de la loi ont droit à une indemnité au titre du préjudice correspondant à la perte du droit de présentation fixée par le juge de l’expropriation, dans les conditions définies par les articles L. 13-1 à L. 13-25 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique ;

 

Que l’article L. 13-13 de ce code, alors en vigueur, dispose que les indemnités allouées doivent couvrir l’intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l’expropriation ;

 

Que, selon la décision du Conseil constitutionnel n° 2010-624 du 20 janvier 2011, laquelle s’impose, en application de l’article 62, alinéa 3, de la Constitution, à toutes les autorités juridictionnelles, le préjudice de carrière, le préjudice économique et les préjudices accessoires, toutes causes confondues, initialement prévus à l’article 13 précité, ne peuvent être indemnisés, étant purement éventuels, sans que soit méconnue l’exigence de bon emploi des deniers publics et créée une rupture caractérisée de l’égalité devant les charges publiques ; qu’ainsi, après avoir énoncé que l’indemnisation du préjudice subi par les avoués du fait de la loi ne saurait permettre l’allocation d’indemnités ne correspondant pas à ce préjudice ou excédant la réparation de celui-ci et constaté, d’abord, que la loi ne supprimait pas l’activité correspondant à la profession d’avoué, ensuite, que les anciens avoués pouvaient exercer l’ensemble des attributions réservées aux avocats et bénéficier notamment, à ce titre, du monopole de la représentation devant le tribunal de grande instance dans le ressort duquel ils avaient établi leur résidence professionnelle, le Conseil constitutionnel a décidé que les préjudices de cette nature n’étaient pas indemnisables, comme étant sans lien direct avec la nature des fonctions d’officier ministériel supprimées et dépourvus de caractère certain, de sorte que l’article 13 était contraire à la Constitution, en ce qu’il avait prévu leur indemnisation ;

 

Que, par suite, toute demande d’indemnisation du préjudice de carrière, du préjudice économique et des préjudices accessoires, toutes causes confondues, dont la survenance est imputée à la loi, se heurte à l’autorité attachée à la décision du 20 janvier 2011 ;

 

Qu’il résulte de ce qui précède que, dès lors que le préjudice direct, matériel et certain qui doit être intégralement indemnisé, en application de l’article L. 13-13 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, ne peut être constitué par l’un ou l’autre de ces chefs de préjudice, la cour d’appel, en refusant d’accueillir la demande d’indemnisation au titre de préjudices de même nature invoqués par Mme Y... et M. X..., loin de violer les articles 13, alinéa 1er, de la loi du 25 janvier 2011 et L. 13-13 précités, en a fait, sans dénaturer la décision du Conseil constitutionnel ni méconnaître les termes du litige, l’exacte application ;

 

Attendu, d’autre part, qu’aux termes de la deuxième phrase de l’article 1er du Protocole n° 1 additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (la Convention), nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international ;

 

Que, selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH, Scordino c. Italie (n° 1) [GC], n° 36813/97, 29 mars 2006), la mesure d’ingérence emportant privation de propriété doit être justifiée au regard de cette disposition ; qu’elle doit ménager un juste équilibre entre les exigences de l’intérêt général de la communauté et les impératifs de la sauvegarde des droits fondamentaux de l’individu ; qu’en particulier, il doit exister un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé par toute mesure privant une personne de sa propriété ; que cet équilibre est rompu si la personne concernée a eu à subir une charge spéciale et exorbitante ; que, sans le versement d’une somme raisonnablement en rapport avec la valeur du bien, une privation de propriété constitue, en principe, une atteinte excessive ; qu’un défaut total d’indemnisation ne saurait se justifier, en application de l’article 1er du Protocole n° 1, que dans des circonstances exceptionnelles, mais que cette disposition ne garantit pas dans tous les cas le droit à une réparation intégrale ; que des objectifs légitimes d’utilité publique, tels que ceux que poursuivent des mesures de réforme économique ou de justice sociale, peuvent militer pour un remboursement inférieur à la pleine valeur marchande du bien (CEDH, Scordino c. Italie, précité ; Lallement c. France, n° 46044/99, 11 avril 2002) ;

 

Que la cour d’appel a recherché si la suppression du monopole de représentation des avoués devant les cours d’appel avait ménagé un juste équilibre entre les exigences de l’intérêt général et les impératifs de la sauvegarde des droits fondamentaux de l’individu, en ne faisant pas peser sur les personnes intéressées de charge disproportionnée ;

 

Qu’elle a, d’abord, constaté que la loi du 25 janvier 2011 avait supprimé le monopole de représentation des avoués dans un but d’intérêt public de simplification de la procédure et de réduction de son coût ;

 

Qu’elle a, ensuite, rappelé que la décision du 20 janvier 2011, par laquelle le Conseil constitutionnel a jugé que le préjudice de carrière, le préjudice économique et les préjudices accessoires, toutes causes confondues, ne pouvaient faire l’objet d’une indemnisation, est fondée sur le respect des exigences constitutionnelles de bon emploi des deniers publics et de l’égalité devant les charges publiques, qui ne serait pas assuré si était allouée à des personnes privées une indemnisation excédant le montant de leur préjudice ;

 

Qu’elle a, enfin, retenu, en premier lieu, que la loi du 25 janvier 2011, intégrant les avoués dans la profession d’avocat, avait été adoptée à la suite de deux rapports présentés au Président de la République, remettant en cause la justification de la double intervention de l’avoué et de l’avocat en cause d’appel, ainsi qu’en raison des exigences de la directive 2006/123/CE du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur, en deuxième lieu, que le législateur avait confié au juge de l’expropriation, dans les conditions prévues par le code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, le soin d’évaluer, au jour du jugement, selon une date de référence fixée à la date d’entrée en vigueur de la loi, le préjudice subi par les avoués du fait de celle-ci, en troisième lieu, qu’à cette date, l’avoué, privé du monopole de postulation devant la cour d’appel, mais à qui la loi avait conféré le titre d’avocat et reconnu de plein droit une spécialisation en procédure d’appel, conservait son outil de travail, dès lors qu’il pouvait continuer d’exercer son activité, quand bien même une très grande partie de sa clientèle était constituée d’avocats susceptibles de devenir des concurrents, en quatrième lieu, qu’il pouvait, en conséquence, postuler devant le tribunal de grande instance dont il dépendait, plaider devant toutes les juridictions, donner des consultations et rédiger des actes sous seing privé, en cinquième lieu, que de nombreuses parties continuaient, eu égard à la spécificité et à la complexité de la procédure devant la cour d’appel, de recourir aux services des anciens avoués pour la procédure, en plus de leur avocat plaidant, en sixième lieu, que des partenariats entre avocats et anciens avoués pouvaient être mis en place et, en dernier lieu, que l’évolution des revenus des avoués dépendait pour une grande part de choix professionnels faits postérieurement à la date de référence et de leurs aptitudes personnelles à s’adapter à la nouvelle situation concurrentielle résultant d’une loi s’inscrivant dans une évolution historique ;

 

Que la cour d’appel a déduit de ces constatations et appréciations, sans dénaturer la décision du Conseil constitutionnel, ni méconnaître l’objet du litige, ni indûment priver Mme Y... et M. X... de leur droit d’accès au juge, au sens de l’article 6, § 1, de la Convention, qu’au regard des objectifs d’utilité publique de simplification de la procédure et de réduction de son coût poursuivis par la réforme de la représentation devant les cours d’appel, la suppression du monopole de représentation des avoués prévu par la loi du 25 janvier 2011 constituait une mesure d’ingérence justifiée dans le droit au respect des biens, dès lors qu’elle présentait un caractère proportionné au regard de l’article 1er du Protocole n° 1 additionnel à la Convention, ce dont il résultait que Mme Y... et M. X... n’avaient pas supporté de charge disproportionnée en n’obtenant pas la réparation des divers préjudices par eux imputés à la loi, dont l’absence d’indemnisation était, de surcroît, fondée sur leur caractère indirect et incertain ; qu’elle a ainsi légalement justifié sa décision, abstraction faite du motif surabondant critiqué par la quatrième branche ;

 

Sur la recevabilité du pourvoi n° G 15-19.341, contestée par la défense :

 

Attendu que la SCP soutient que le pourvoi du Fonds d’indemnisation de la profession d’avoué est irrecevable, en ce qu’il n’est pas dirigé contre le commissaire du gouvernement ;

 

Mais attendu que la décision fixant une indemnité au titre de la suppression de la profession d’avoué n’étant pas prononcée au profit du commissaire du gouvernement ou contre lui, les dispositions de l’article 615 du code de procédure civile ne sont pas applicables ; que, dès lors, le pourvoi est recevable ;

 

Sur le premier moyen de ce pourvoi, [...] :

 

Attendu que ce moyen n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

 

Mais sur le deuxième moyen du même pourvoi, pris en sa première branche :

 

Vu l’article 62, alinéa 3, de la Constitution, ensemble l’article 13, alinéa 1er, de la loi du 25 janvier 2011 et l’article 1er du Protocole n° 1 additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

 

Attendu qu’aux termes du premier de ces textes, les décisions du Conseil constitutionnel s’imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles ; qu’il résulte du deuxième que les avoués près les cours d’appel en exercice à la date de la publication de la loi du 25 janvier 2011 ont droit à une indemnité au titre du préjudice correspondant à la perte du droit de présentation ; qu’en revanche, selon la décision du Conseil constitutionnel du 20 janvier 2011, le préjudice de carrière, le préjudice économique et les préjudices accessoires, toutes causes confondues, étant indirects et incertains, ne peuvent être indemnisés, sans que soit méconnue l’exigence de bon emploi des deniers publics et créée une rupture caractérisée de l’égalité devant les charges publiques ;

 

Attendu que, pour accueillir la demande d’indemnité de remploi formée par la SCP, l’arrêt retient que, s’agissant de l’indemnisation de la perte du droit de présentation, les textes applicables en matière d’expropriation, auxquels renvoie la loi, prévoient pour son titulaire, outre une indemnité principale, une indemnité de remploi, calculée à partir de l’indemnité principale et destinée à couvrir les frais de tous ordres normalement exposés pour l’acquisition de biens de même nature ; qu’il ajoute qu’il est admis, en matière d’expropriation, qu’il n’est pas nécessaire de justifier le remploi et que l’indemnité est due au cas même où, en raison de sa nature particulière, le bien ne serait pas susceptible de remplacement, que cette indemnité, directement complémentaire de l’indemnité principale comme étant calculée en fonction du montant de celle-ci, est due également en cas de cessation d’activité et qu’il n’est pas contestable que la réforme de la représentation devant les cours d’appel, aboutissant à la suppression de la profession d’avoué, impose aux anciens avoués de se réorganiser, le cas échéant de changer de locaux par suite de réduction du personnel, de matériels, de support sur les plans matériel et juridique et de supporter des charges fiscales ;

 

Qu’en statuant ainsi, alors que toute demande d’indemnisation du préjudice de carrière, du préjudice économique et des préjudices accessoires, toutes causes confondues, dont la survenance est imputée à la loi, se heurte à l’autorité attachée à la décision du Conseil constitutionnel précitée, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

 

Sur le troisième moyen du même pourvoi :

 

Vu l’article 62, alinéa 3, de la Constitution, ensemble l’article 13, alinéa 1er, de la loi du 25 janvier 2011 et l’article 1er du Protocole n° 1 additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

 

Attendu que, pour accueillir les demandes d’indemnités pour frais d’archivage et charges ordinales formées par la SCP, l’arrêt retient qu’il convient de prendre en considération les charges occasionnées par la loi, qui ont fait l’objet de propositions de la part de la commission d’indemnisation ; qu’il ajoute que la SCP justifie ainsi de ces frais et charges, directement liés à la suppression du droit de présentation ;

 

Qu’en statuant ainsi, alors que toute demande d’indemnisation du préjudice de carrière, du préjudice économique et des préjudices accessoires, toutes causes confondues, dont la survenance est imputée à la loi, se heurte à l’autorité attachée à la décision du Conseil constitutionnel précitée, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

 

PAR CES MOTIFS et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi n° G 15-19.341 :

 

REJETTE le pourvoi n° Q 15-17.346 ;

 

DÉCLARE RECEVABLE le pourvoi n° G 15-19.341 ;

 

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu’il rejette la demande d’indemnité de Mme Y... et M. X... au titre de la suppression de la profession des avoués, l’arrêt rendu le 2 avril 2015, entre les parties, par la cour d’appel de Paris (n° 49/2015) ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris, autrement composé

 

Président : Mme Batut

 

Rapporteur : M. Truchot, conseiller

 

Avocat général M. Cailliau

 

Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain, soltner et Texidor ; SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer

 

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Vale sempre la pena di fare una domanda, ma non sempre vale la pena di dare una risposta (O. Wilde)